top of page

POÈMES

Au fond des océans, les algues se repaissent,
Si lasses et enlacées, de songes et d'illusions.
Elles ont assez de temps pour croire que cessent
A jamais les tourments, divine procession.

Non qu'elles se délassent, ces penseuses inutiles,
Qui jouent aux malheureuses, hélas ! Rêves de plomb,
Elles aiment à déchiffrer, ces apprenties sibylles,
Du fond des océans, le ciel et l'horizon.

Minutieuses et précises, cuvant dans leur bouillon
Un rosaire enivrant, puis d'un triste poison
S'abreuvent abondamment ces guerrières insolentes,
Se répétant sans cesse qu'elles sont nées amarantes.

Fleurissent les balcons du spectre d'Holopherne
Qui à l'automne arrache en vain ces bouquets ternes ;
Pendant qu'elles se lamentent du fond de leur prison,
Au fond des océans, défilent les saisons.

LES ALGUES

« Nos vrais ennemis sont en nous-mêmes » (Bossuet)

 

« Les âmes sordides arrachent les cicatrices du cœur pour les jeter dans un océan d'amertume »

« Dieu a fait l'aliment ;
le diable, l'assaisonnement »

(James Joyce)

Par-delà cauchemars et monstruosités
S'endorment les éboueurs de la vérité,
Ces aigrefins, arracheurs de dents, matadors
Du sérail et pisse-copies, curés de Gomorrhe.

En riant au nez du peuple abattu, ces loups
Jadis bercés par l'ange Indignation, ces poux
Bien nourris dans l'auge où se vautrent mille pourceaux
Leurs frères, donneraient des ailes au grand Hugo.

Crapouilleux au sommet de la perfidie,
Dévorant les humbles traînés aux gémonies ;
Gloire à toi, marchand de papier : Alléluia !
Tu contribues fort bien à Timisoara.

L'immonde créature, de ses victuailles,
Sirote le jus amer de son élection
Quand les microbes, si nombreux dans ses entrailles,
Lui mendigotent un bout de pain pour l'édition.

“ Eh Maître ! Saint-Père ! Dieu ! Nourris tes rejetons ;
Quelques miettes rempliraient fort bien nos estomacs.
À nous mépriser, nous préférer tes étrons,
Cela conduit un peuple loin de Timisoara ! ”

Par-delà forfanteries, grimaces et palabres
Se mélangent à la vérité de bas instincts,
Qui, portés par une ultime danse macabre,
S'élancent aveuglément dans un charnier roumain.

Nul doute que l'éclat des belles apparences
Vacille dans les ténèbres des connivences.

PAR-DELÀ FORFANTERIES,
GRIMACES ET PALABRES
L'ENNEMI INTIME

Et je vis que ton corps flottait sur des eaux silencieuses,

S'allongeant et se déformant au rythme des flots incertains,

Telles des rouges larmes -vision d'une délivrance affreuse-

Fuyant un corps sans âme, suivant les traces d'un autre destin.

Et il te fallut renaître avec cette effroyable lame rouillée

Qui siège au-dessus du front ; puis dans une lente agonie,

Déloger l'ennemi intime qui dans les eaux jadis te fit tomber,

De tes mains l'étrangler... mais dans ton âme se joue la survie.

Et je vis ton corps flotter sur des eaux lumineuses,

S'élever sans effort et rivaliser avec les cygnes ;

Et dans un puissant soupir offert par la Fortune généreuse,

S'unissent alors un corps et une âme insignes.

Page 1

« Ô Graal céleste », -l'ultime vœu du damné-, « source de vie aux espérances lointaines,

Crible ma poitrine de tes flèches dorées et laisse, je t'en conjure, jaillir les rayons sacrés.

Le long d'une rivière froide et chancelante,

Mon âme gavée grelotte, suffoque puis se pâme.

Et lorsqu'un cri d'outre-tombe la secoue, toute frémissante

Au milieu du désert, elle déchire les pages du grimoire infâme.

Répandre sa bave sur la miraculeuse lumière,

Répondre au son du clairon par un hurlement féroce ;

A-t-il raison, l'ange fraternel, de se résoudre

à dénigrer ces prières ?

​Fut-ce aussi terrible que d'être jeté

dans d'étroits fourneaux,

Ces quelques de profundis hasardeux,

intéressés et atroces,

Conduisent cette âme à noyer la cendre

dans de mauvaises eaux.

Que nous veut cet intime bourreau ?

Soumettons la nuit, ce ventre qui accueille toutes les immondices,

Aux fers que forgent notre caractère et notre puissance.

Ne craignons point la crainte et effrayons la peur.

Page 2

Dans l'âtre des rois, la jeune fileuse s'est essuyée.

Assis sous sa mamelle couverte de suie, un chien errant

s'est vautré dans le sang de la terrible. "Mais quel bel enfant ! 3 kilos !

Emballé ! Allez ! File petit ! Va-t-en voiler impunément la lumière

sous laquelle tu as poussé tes cris". Fut-elle aussi sordide

que d'étroits fourneaux, son âme s'envole

noyer la cendre, vers de mauvaises eaux.

A-t-elle répondu au clairon par un hurlement féroce ?

A-t-elle brait au clair de lune ? La symphonie s'achève.

Est-elle tapie dans l'ombre, attachée au poteau ?

A-t-elle attendu l'ordre, la lame dans le cerveau ?

Elle glousse, elle cacarde, elle rugit parfois, mais aucun

de ses cris n'a été entendu dans le royaume épargné,

au pied du laurier. La légende dit

qu'ils se sont évaporés, effrayés par tout ce qui aurait pu

éclairer son triste visage de chien errant.

[ODE AUX CHAROGNARDS ET

AUX CRAPAUDS A CRAVATE]

 

Le petit colporteur voyage sans valise.
Ce vagabond aussi gracieux qu'une limace
Répand sa bave noire, et arpente à sa guise
Les hôtels crasseux ; le crapaud fait des traces.

Le petit colporteur remue la vase et danse,
Puis clabaude sur les passants qui ne rient point :
« Eh vous misérables, vous avez de la chance !
Le loup sanglant quatre vingt-treize est bien trop loin ! »


Le petit colporteur, être au regard vitreux,
Sombre bourreau plus affamé qu'un chien errant,
Terrifie les anges sous le toit des pouilleux ;
Si l'or demeure ailleurs, la gamelle est dedans.

Le petit colporteur brime la belle France
Tout en curant une marmite sous la table ;
Là où un porc vomirait ce ragoût rance
Enjouée, la mouche bleue s'exclame : « À l'étable ! »

LE PETIT COLPORTEUR

« Laissez-les, ce sont des aveugles qui conduisent des aveugles : si un aveugle en conduit un autre, ils tombent tous deux dans la fosse » (Évangile selon Matthieu)

Page 3

« Parfois, notre destin ressemble à un arbre fruitier en hiver. Qui penserait que ces branches reverdiront

et fleuriront, mais nous l'espérons, nous le savons » (Goethe)

Quand chaque année le ciel agite sa besace,
Un vaste tapis blanc s'envole. Quelle grâce !
Cette danseuse, messagère des temps lointains,
Par son éclat, m'attire vers son écrin.

Mon âme sombre, s'égarant dans un vieux songe
Chavire, boit, s'enivre d'un mal qui la ronge.
Mes doigts qui ont laissé tomber les grains de sable
Effilent violemment le voile impénétrable.

Ô brûlant Vulcain, toi qui règnes par les flammes !
C'est de ton rutilant sourire que j'ai besoin ;
Puisse en finir et trépasser le mauvais charme !
Et que ton souffle ardent m'en débarrasse au moins.

Et quand mes pieds frotteront la pierre glacée
Qui cajole orgueilleusement le feu sacré,
D'un air satisfait je pourrai enfin dire :
« Ô sort, dans tes promesses je veux me blottir ! »

LES ARDENTES PROMESSES
Page 4
CELLE ET CELUI

Celle qui a déployé ses ailes

Celui qui l'a invitée à s'envoler

Tous deux ont rejoint l'horizon

 

Celle qui rayonne sur le chemin

Celui qui s'en approche doucement

Tous deux ont franchi l'horizon

 

Celle qui murmure ses doux secrets

Celui qui aime les pénétrer

Tous deux vont retourner dans leur maison

 

Elle qui regarde le feu sacré

Lui qui le dorlote avec fierté.

Se souvint-il qu'autant de chutes, aussi longues et nombreuses furent-elles,

Ne l'ont jamais alangui, bien que plongé dans les ondes troubles et immortelles ;

Au contraire il advint c'est certain, que, propulsé grâce aux divins battements et à la voix de son étoile paternelle

A l'extérieur du puits, il reprit son périple, intrigué par cet indéfinissable appel.

D'où croupissent les vers du désespoir, résonnera toujours le cœur d'un enfant.

Et pour peu que les orages,

de leurs longs bras acérés,

S'amusent à fendre durant leur court voyage

Les voûtes de notre ciel privilégié,

Je bannirai sans crainte

jusqu'aux confins du dernier rivage,

Leurs teigneux rejetons

que notre étoile n'a jamais invités.

Page 5

Avant même que Jouissance et Mélancolie

n’eurent le temps de déverser leur liqueur rance,
Dégoulinante et nourricière, savante et dégradante,

naquit la douce Indolence ;
Larmoyante et révélatrice, marchandant par-delà les conventions,
On se mit à sucer ses rameaux lisses

pour en vomir de monstrueux bourgeons.

 

A se morfondre et faire ses délices de la paresse,
On se gorge d'amertume, on se gorge d’ivresse.
On écoute les funestes chansons d’un nocher dans un bateau qui erre,
D’un triste comédien qui, quoi que l’on fasse,

nous mène en dansant tout droit en enfer.

Mais diantre ! Oh mais quels mortels tourments !

Quelle attachante compagnie que cette Insouciance ;
Elle rôde, affamée, la louve, tournée vers le fourneau de l'insolence,
Séduisante et lancinante, traîtresse des nouveaux temps
Qui, à sa guise, tourmente et réchauffe impunément.

 

A se morfondre et faire ses délices de la paresse,
On se gorge d'amertume, on se gorge d’ivresse.
On écoute les funestes chansons d’un nocher dans un bateau qui erre,
D’un triste comédien qui, quoi que l’on fasse,

nous mène en dansant tout droit en enfer.

La divine est née, conçue dans une étincelle,

bercée par les ronrons de l’ennui,
Violente et belle comme l'inconnue d'une secrète nuit ;
La mignonne, si convoitée, la tête tombante, douce comme l’était Chloris,
Disparaît dans la brume, en émiettant sa fine couronne de lys.

A se morfondre et faire ses délices de la paresse,
On se gorge d'amertume, on se gorge d’ivresse.
On écoute les funestes chansons d’un nocher dans un bateau qui erre,
D’un triste comédien qui, quoi que l’on fasse,

nous mène en dansant tout droit en enfer.

Autant de cadavres qui au son du tocsin, dans un long râle abject, se relèvent,
Que de corps gémissants et fragiles, perdus dans le brouillard de leurs ambitions secrètes,
Autant de pères aux sombres visages absorbés par quelques desseins troubles,
Que de fils enragés qui, sous de lourdes pluies noires et glaçantes,

compissent les dernières murailles de leur passé.
Encavernée jusqu’aux talons, cette faune s’est empêtrée dans des nuits sans fin.

Elle bredouille dans une sourde complainte à la gloire de ses téméraires aïeux, derrière les coups de clairon rouillé, le chapelet de son inexorable malheur dans une longue marche forcée.

FELDER

En ces temps misérables, le moindre soupçon de bienveillance n'a pas de prix.

Il se pourrait même qu'une simple lumière puisse éclairer l'esprit le plus ténébreux,

que le simple lait de la tendresse humaine puisse cicatriser mille plaies, mille plaies que

lèchent mille rats, mille rats que couvent mille sorciers, mille sorciers que mobilisentn mille

travaux, mille travaux qu'enivrent mille poisons. En donnant votre sein au malheureux,

puisse la glace fondre dans l'instant. Qu'elle cesse à tout jamais de garrotter la nuit, de la

corrompre et de voiler les langues ! Et puis que nous veut cet intime bourreau ? Soumettons

la nuit, ce ventre qui accueille toutes les immondices, aux fers que forgent notre caractère et

notre puissance. Ne craignons point la peur et effrayons la crainte. Sachez mon brave que

le miracle n'appartient plus à l'histoire. Il ne tient qu'à nous, hommes de la providence, de

démasquer le monstre et de défaire le mur de pierre qui prive son cœur de tout destin radieux.

Finissons-en avec tous ces piliers d'argile, aussi fragiles que mille feuilles, et bâtissons ensemble

le temple du repos. L'enfant sait lire le plan mais il ignore le vrai langage, celui des hommes. Quant

au vieillard, s'il n'épuise la douce infirmière qui ronfle à ses côtés, il s'efforce en bon expert d'utiliser

ses heures à paresser... Il se vautre. Non dans un cercueil, mais dans les couches usées de l'histoire.

Il est aveugle mais sait parler. Ainsi, celui qui croit voir ne saura jamais si les esprits malades sont

réellement guérissables. Il ne fait que supposer.

LA VIEILLE REINE

Tu n'as que des histoires de liberté dans la tête ! Seuls ceux qui se sont damnés eux-mêmes

errent sur de tels chemins. Mais il ne faut pas les sous-estimer. Dans leur solitude, réside un

infatigable fléau : l'espoir. Et moi, je n'aime pas l'espoir. A cause de lui, j'ai dû me marier à des

tyrans, enfanter des traîtres, m'associer avec des bandits de premier ordre. Et tout ça pour

quoi ? Pour l'étouffer de mes vieilles mains, pour maintenir l'ordre dans le clapier. L'infâme clapier.

Le désespoir est bien plus tranquille. Quand ils en sont abreuvés, les hommes se sentent solidaires

et tous unis dans la médiocrité.  Quelle paix ! Quel confort !

Page 6

NOUS NOURRISSONS NOS PROPRES CHIENS ENRAGÉS

« We feed our own rabid dog » (Juice Of Miranda)

Ils étaient tels des corbeaux englués dans de lourdes glaises, l’œil ombrageux, pétillant de fureur, dont les rares tentatives d’évasion se ponctuaient toujours par des évidences amères, lesquelles, sous les malheureux cris de leurs frères déjà condamnés, leur laissaient encore la liberté de contempler les aigles s’envoler.

 

Ceux-là voletaient, ceux-ci tournoyaient, tous sans aucune exception, s’élevaient sans effort -triste réalité- et sous le poids de leurs fientes, -triste nécessité-, une ruée de chiens enragés s’en allait réduire en miettes les vieux corbeaux affamés.

Page 7
Ludovic Robin.jpg

QUE NOUS SOMMES BIEN SINISTRES

 

Chers amis,

 

Que nous sommes bien sinistres. Auditivement sinistres, visuellement sinistres, gustativement sinistres, olfactivement sinistres, tactilement sinistres. Sinistres en tout point. Nous le sommes et nous le resterons.

 

Qui n'a jamais singé, pris dans les griffes d'un lent fardeau, le terrible pousseur de pierre, humble vieillard détraqué ? Mes pauvres petits enfants que les astres ont gâtés, voyez comme la grosse boule vous a apprivoisés. Accablante, épaisse pierre ! Frappez-la si l'audace vous monte au collet ! Le rocher, le pavé, la happelourde... (Mais bon sang), brisez-les ! Car si c'est du crochet que dépend le poisson, c’est au guichet que les brebis se succèdent, vous saisissez ?

Que nous sommes bien sinistres.

 

Vers l'automate, dégoulinant de coquetterie, se tournent les numéros sur patte, -batteries improvisées- qui, sur tous les dos, s'imprimeraient si la nature l'eut autorisé ; de temps à autre, aux autres corps, chevillé, avance un de ces pantins désarticulés, laissant le reste du troupeau immobile et ensommeillé.

Que nous sommes bien sinistres.

 

Un chant de victoire se prépare timidement, sans une once d’insolence, puis d'une âpre gorge s'envole un petit air de révolte mais étouffée par la moiteur, la vaine mélodie virevolte ; enfin, sans l'écho attendu, la vaine voix vire, la voix tremblante s'éteint dans les bras engourdis du silence.
Que nous sommes bien sinistres.

 

La tempête aigrelette a fini de gronder, et d’écarlate à livide, l’ange hagard s’est encore une fois éloigné ; c’est là que l’automate,-le temps l’a fatigué-, relève de nouveau son visage : « Cent vingt-quatre !? » Et quatre-mille cochons en chœur, parfaitement immondes, comme s’ils se rendaient à l’auge, apprêtés pour rentrer dans la ronde, comme s’ils s’en allaient grappiller les restes d’un vieux bovin sans âge, et…

Que nous sommes bien sinistres.

 

A-t-on déjà vu autant de gamellards barboter dans le purin de la servitude d’où se dégagent de violents relents de saumure ? Mais ne nous éternisons pas un instant de plus dans cet interlude car... miracle !? Un des leurs a obtenu le bout de papier tant convoité, à l’usure ; heureux qui comme un forçat, a fait jaillir une fontaine de sueur ou comme celui-là qui, dans un sinistre bouquet final, conquit le document sans saveur.

Que nous sommes bien sinistres.

ÉLOGE OU DÉCADENCE

 

"C'était un matin comme les autres… Et voilà que j’y repense à la bête ! Je la cherche… la petite bêbête !"

 

Que de femmes souffrantes, de femmes soumises, à la dignité perdue ; dites-moi s’il pourrait m’en coûter de ne pas les considérer à leur juste valeur, et si un bénéfice quelconque pourrait être tiré en les honorant sans que l’on me suspecte d’agiter le spectre des sombres heures ? Que de femmes souffrantes, de femmes soumises, à la dignité volée; j’offre mon âme à leur lutte que la postérité, un jour, peut-être, sûrement, rangera aux côtés de Ronsard, Vésale et Galilée. Hommes abusifs, hommes régnants, hommes à la dignité usurpée, je pars sacrifier votre histoire pour rétablir la justice que vous avez souillée de votre vanité abyssale.

 

Maîtresse, à défendre mes verses impropres ne seriez-vous pas disposée, en bonne avocatesse, prête à vomir votre verbe sans vergogne, face aux lourds ennemis de l’égalitée ? N’entendriez-vous pas consentir à hisser la drapelle des justes, sur des toites jadis construites par un architecte malfaisant, patriarche impérieux, épouvantable mari d’une noble cuisinièse à demi sommeillant ? Vous deviendriez l’architectesse d’une édifice jusqu’alors jamais entreprise. Vous y porteriez la scelle de la justice rationnelle, que tout bonne humaniste se doit d’apposer. Ne croiriez-vous pas alors, si je combattais les préjugées du temps, en bonne ministresse, que ma folie du moment aurait force et merveille, si je vous la confiais ? Au lieu de flatter ces tristes altruistes, dont la fureure paralyse la divine sagesse, ô future interprétresse des délires fugaces qui enfièvrent mon cœur, et si au lieu, ces lézards, de les ouïr écorner les pierres jadis posées, vous les chassiez de notre temple en devenir et gardiez en tête que nous avons d’autres desseins qu’une langue à moderniser ?

 

Paniqué, pour peu que je m’en allasse me fourvoyer dans les filets d’une consommateuse, je filai à deux passes m’aguerrir un soir, auprès d’une charmante bibliothécairesse, guère avare de bons mots, qui, aux éclats, tordue dans le noir, n’y vit ni outragette ignominieuse ni inhabile petitesse. Antiquairesse aux babiles trompeuses, vieille suffragette à l’idylle dans l’œuf brisée, aux accents de tigresse au poil, elle lâcha, de ses doigtes pleines de tendresse, l’ouvrage honnie que tout réformateur sans noblesse, que je suis assurément, recherche pour se parfaire. Avant de filer d’une autre passe pressée chez une hypothétique notairesse, authentifier le document pour m’assurer, de ses propos la digne justesse, elle jeta, les doigtes remplies d’agilité, dans un bouillon, ses restes d’herbes édéniques, ; « c’est un vieux secret de botanistesse » me lança-t-elle cette fantaisie apothéotique, dans un maelstrom de rires qui, croyez-moi hommes inquiets, pourrait vous convaincre qu’aux femmes qui souffrent, aux femmes qui subissent, aux femmes qui perdent toute dignitée, vous avez d’autres combats à donner.

Page 8
bottom of page